Suite aux mesures annoncées par le Gouvernement ces dernières semaines lors du discours de la Première ministre à la Sorbonne et au Comité interministériel des villes, les élus du FFSU souhaitent attirer l’attention sur des enjeux insuffisamment pris en compte et faire part de leurs propositions.
Nous, élus du FFSU, nous réjouissons que :
- La démarche soit interministérielle et qu’elle ne soit pas réduite aux quartiers en politique de la ville
- Que le dialogue entre les élus locaux et l’Etat soit affirmé comme une priorité
- Que des moyens soient annoncés et notamment un renforcement de la présence humaine
Nous regrettons que les réponses apportées aux événements de l’été relèguent au second plan l’élément déclencheur de la mort de Nahel suite à un tir policier et l’urgence d’une amélioration des relations entre la police et la population, en particulier les jeunes.
Le renforcement de la présence humaine sur le terrain des forces de sécurité de l’Etat est indispensable mais non suffisant. Nous sommes convaincus de l’importance de l’ancrage local de l’action des forces de sécurité, de la nécessité de recentrer leur action sur la résolution de problèmes et le service rendu aux citoyens, dans toute leur diversité, et nous constatons des dérives qui fragilisent notre démocratie. Nous appelons de nos vœux une profonde réforme, en s’appuyant sur un partenariat renforcé avec les collectivités territoriales et les citoyens. Nous aimerions que cette réforme porte sur une véritable redéfinition de la doctrine d’emploi des forces de sécurité de l’État ainsi que sur une refonte des recrutements, formations, affectations, critères d’évaluation, etc.
Nous souhaitons également remettre en lumière l’importance de la place et les moyens accordés à la prévention.
Nous nous réjouissons que l’Etat ait entendu que la prévention de la délinquance est une priorité pour les élus locaux et du soutien annoncé au développement de la médiation sociale et à sa professionnalisation.
Cependant, nous notons qu’une grande majorité des mesures annoncées portent sur la police et la justice, principalement sur le volet sanction. Nous rappelons la nécessité d’un équilibre entre prévention, sanction et cohésion sociale pour mener des politiques de sécurité efficientes sur les moyens et longs termes. Le renforcement de la lutte contre les inégalités ou de la protection de l’enfance, notamment, doivent être étroitement liés aux politiques de sécurité.
Nous notons qu’une nouvelle stratégie nationale de prévention de la délinquance est annoncée pour début 2024. Nous réaffirmons notre souhait d’être associés aux travaux, afin de partager notre bilan de la précédente stratégie et de faire remonter nos priorités et initiatives inspirantes, et espérons des moyens à la hauteur des besoins.
Nous appelons à la vigilance sur l’évolution des prérogatives des polices municipales.
Il est important que les polices municipales puissent exercer leurs missions au mieux, dans toutes leurs diversités, pour répondre aux besoins des citoyens, et cela peut nécessiter des évolutions. Nous sommes prêts à en discuter pour simplifier les procédures et améliorer les capacités d’actions de nos polices municipales mais en restant vigilants à ce que :
- des transferts de compétences ne consacrent pas une nouvelle défausse de l’Etat et de ses pouvoirs régaliens sur les collectivités, sans moyens permettant de les exercer réellement.
- ces évolutions ne creusent pas les inégalités entre les territoires
- les polices municipales restent des polices de proximité
Cependant, la volonté de confier certaines missions d’OPJ aux polices municipales et de les placer de facto sous l’autorité du Procureur de la République ne nous semble pas souhaitable.
Nous préconisons que les mesures annoncées soient bien intégrées aux dynamiques locales existantes et viennent les renforcer, sans ajouter au mille-feuille maintes fois dénoncé.
La première ministre l’a dit, des dispositifs existent déjà dans nos communes. Il s’agira notamment de renforcer les stratégies territoriales et les conseils locaux de sécurité et de prévention de la délinquance. Pour cela, les élus locaux ont besoin :
- de plus de lisibilité et de soutien politique, au niveau national comme local
- de moyens d’ingénierie, notamment pour les coordonnateurs CLSPD
- de mécanismes de coproduction avec les habitants
Nous invitons à être particulièrement attentifs à cela pour le déploiement des forces d’actions républicaines pour lesquelles des territoires d’expérimentation ont été sélectionnés (Besançon, Valence et Maubeuge). Nous nous interrogeons sur le pilotage de ce dispositif qu’il nous semble nécessaire de coordonner avec la stratégie nationale de prévention de la délinquance. Par ailleurs, nous attendons de la transparence sur les critères qui permettent de retenir tel ou tel territoire.
Si nous rejoignons la Première ministre sur l’importance de la lutte contre les trafics de stupéfiants, nous appelons à des réformes bien plus ambitieuses.
Concernant le trafic de stupéfiants, nous constatons que, malgré les nombreux dispositifs policiers et judiciaires existants pour pénaliser les trafics et les consommateurs, les réponses apportées jusqu’à présent n’ont pas permis d’endiguer le phénomène. Pire, elles ont des conséquences importantes en matière de santé et de sécurité publique et entraînent un sentiment d’abandon de la population ainsi qu’une décrédibilisation de l’action publique. Nous estimons qu’il est urgent que l’ensemble des politiques publiques soient mobilisées (santé, sécurité…) pour une approche holistique, prenant en considération aussi bien la demande que l’offre de drogues.
Nous élus du FFSU, sommes disponibles pour poursuivre les discussions, en partenariat avec les autres associations d’élus locaux.
Nous réaffirmons notre souhait de renforcer la coopération entre l’Etat et nos villes, à partir de diagnostics partagés et dans un équilibre des moyens mis à disposition respectant les compétences de chacun.
Si nous nous réjouissons du caractère interministériel annoncé, nous appelons à ce que l’élaboration des plans et autres dispositifs ainsi que leur mise en œuvre soit véritablement interministérielle.